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11 histoires de femmes : de la mère débordée qui a aussi envie d'être une femme à l'épouse frustrée qui devient nymphomane, en passant par la boss qui a un excès de testérone et la maîtresse qui rêve d'autre chose...

La Ritournelle

de Marc Fitoussi

avec Isabelle Huppert, Jean-Pierre Darroussin, Michael Nyqvist

 

 

Comédie, 1h38 (France).

Sortie le 11 juin 2014.

Brigitte et Xavier sont éleveurs, mais Brigitte se lasse de leur vie routinière et elle somatise son ennui en faisant de l'eczéma. Prétextant un rendez-vous médical, elle s'offre une escapade à Paris. Mais va-t-elle revenir ?

  J U I N   2 0 1 4  

  Et l'AP du mois : 

 

 

Swim Little Fish Swim

de Lola Bessis et Ruben Amar

 

Sous les jupes des filles

de Audrey Dana

avec Géraldine Nakache, Isabelle Adjani, Sylvie Testud, Alice Taglioni, etc etc etc.

 

 

Comédie dramatique, 1h56 (France).

Sortie le 4 juin 2014.

La Ritournelle

Malgré un casting très attractif, j’hésitais à aller voir ce film : l’escapade parisienne d’une agricultrice qui s’ennuie, je voyais mal comment on pouvait échapper au cliché toujours condescendant de l’opposition Paris / province. Et puis Isabelle Huppert les pieds dans la bouse de vache, je n’y croyais pas trop... C’est donc contre toute attente que je suis tombée sous le charme.

 

Il faut avouer déjà que le casting tient largement ses promesses : le duo Huppert/Darroussin fonctionne archi-bien, la complicité et la tendresse d’un vieux couple sont bien là, palpables. Par ailleurs, le jeu un peu cynique et désinvolte de Pio Marmaï sert à merveille son personnage, et Michael Nyqvist (Millenium) est absolument délicieux (avec son petit accent danois... Miam).

 

Côté scénario, La Ritournelle m’a rappelé Le Temps de l’aventure (de Jérôme Bonnell), mais en mieux. Je n’avais pas particulièrement aimé le film de Bonnell : une femme qui s’ennuie et qui vit une aventure de quelques jours avec un étranger, je trouve ça un peu léger comme histoire. Quoique la trame soit similaire, Marc Fitoussi propose quelque chose de beaucoup plus étoffé et intéressant. Grâce à des détails (l’eczéma, le surnom de "petite bergère", la chanson qu’elle entend au supermarché, etc.), il donne au personnage de Brigitte un passé et une épaisseur qui permettent de dépasser le "temps de l’aventure". L’escapade parisienne n’est pas une simple parenthèse fortuite, un hors-temps comme chez Bonnell : c’est un vrai moment de transition et d’évolution. Brigitte se redéfinit complètement, à la fois en tant qu’épouse, en tant que mère et en tant que femme.

 

L’air de rien, il se passe donc beaucoup de choses. Et pour ne rien gâcher, le tout est parsemé de petits moments de poésie, comme le numéro d’acrobate du fils ou la jolie séquence finale (métaphore discrète sur fond de paysage quasi-abstrait).

 

[PS : Wikipédia classe ce film dans la catégorie Comédie, mais je ne suis pas entièrement satisfaite. Il y a bien sûr des moments d’humour mais, mettons, les OSS 117 sont des comédies, et difficile de considérer que c’est le même "genre". Ce n’est pas un drame ni une romance... C’est juste un moment de vie, comme beaucoup de films. Étrange -et dommage- qu’il n’y ait pas de terme spécifique pour les qualifier.]

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Sous les jupes des filles

Sous les jupes des filles est un film choral qui explore, à travers 11 histoires, ce que c’est qu’être une femme aujourd’hui. 11 histoires en 2 heures, c’est ambitieux - en l’occurrence, trop ambitieux : certaines intrigues sont à peine ébauchées quand d’autres sont développées plus largement. Le film n'est cependant pas dépourvu de qualités, à commencer par le casting très sympa et l'approche souvent originale d'Audrey Dana, dont c'est le premier essai d'écriture et de mise en scène.

 

Une typologie s’impose, plus ou moins par ordre d’importance dans le film :

- Ysis (Géraldine Nakache) : la mère de famille débordée qui redécouvre sa féminité

- Rose (Vanessa Paradis) : la chef d'entreprise surbookée qui a un taux anormal de testostérone et aucune amie

- Fanny (Julie Ferrier) : l’épouse frustrée, puis nymphomane 

- Jo (Audrey Dana) : la maîtresse 

- Inès (Marina Hands) : la femme trompée

- Lily (Isabelle Adjani) : la femme qui approche la ménopause

- Marie (Alice Taglioni) : la lesbienne décomplexée

- Agathe (Laetitia Casta) : la célibataire maladroite

- Adeline (Alice Belaïdi) et sa mère : les victimes de harcèlement moral

- Sophie (Audrey Fleurot) : la femme frigide

- Sam (Sylvie Testud) : la femme qui a un cancer du sein

 

Chaque histoire pourrait presque donner lieu à un long-métrage, et à vouloir tout traiter, le film part inévitablement un peu dans tous les sens. Malgré ce foisonnement, l’intention d’Audrey Dana, de faire un film sur la femme moderne dans toutes ses déclinaisons, reste visible et louable, mais certaines intrigues sont forcément sous-exploitées et c’est dommage. Même si je comprends bien que ce n'était pas son projet, il aurait quand même fallu faire un choix : les 2-3 apparitions de Sophie et Sam par exemple, ne suffisent pas à justifier leur présence, et si la frigidité peut être exploitée de manière comique, le cancer du sein et le harcèlement moral ont difficilement leur place dans une comédie. Par ailleurs, ces thèmes instillent une note de tragique dans un film peuplé de stéréotypes de comédie, sans doute pour lui donner une dimension sociale et sérieuse ("comédie dramatique"), mais au détriment d’une unité de ton qui fait défaut

 

Néanmoins, si l’on met de côté ces intrigues "en trop", on se retrouve avec beaucoup de bonnes choses. Audrey Dana porte un regard assez original sur la plupart des thématiques qu’elle aborde, et notamment sur l’équilibre à trouver entre maternité et féminité (à travers Ysis et le renversement du cliché de la baby-sitter canon) et sur le rapport au sexe (Fanny, ses tics et son improbable histoire avec un acteur américain). L’infidélité est aussi traitée de manière intéressante, la maîtresse obtenant rapidement ce qu’elle veut (ou croit vouloir) plutôt que d’être pathétiquement suspendue à la lâcheté d’un homme qui ne quittera pas sa femme, comme c’est souvent le cas au cinéma.

 

Plus caricaturales, la femme de pouvoir et la célibataire maladroite restent savoureuses (Vanessa Paradis est touchante, même si son personnage n’a rien d’original, et les problèmes digestifs d’Agathe portent un gros coup au mythe Laëtitia Casta pour notre plus grand plaisir). Quant aux deux épisodes collectifs de la fin, si la flash mob arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, la séquence de la braderie est en revanche assez réussie et offre une jolie conclusion : les problèmes de chacune se dissolvent provisoirement dans une atmosphère d'amitié et de solidarité féminines (...et aussi dans l'alcool, certes).

 

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L'Ex de ma vie

de Dorothée Sebbagh

avec Géraldine Nakache, Kim Rossi Stuart

 

 

 

Comédie, 1h20 (France).

Sortie le 25 juin 2014.

Avant de pouvoir se remarier, Ariane, violoniste, doit d'abord divorcer. Mais son ex-mari veut d'abord qu'ils fassent le voyage de noces qu'ils n'ont jamais pu faire : c'est parti pour une semaine romantique à Paris...

L'Ex de ma vie

Je ne vais pas trop m’étendre sur ce film, disons qu’il détend. Je me suis un peu endormie au début, mais pas d’inquiétude, je n’étais pas trop perdue en me réveillant ! Le scénario est simple, sans surprise, c’est donc une romcom à la française, qui se laisse regarder mais qui n’a pas de raison de rester dans les annales. D'ailleurs, je l'ai vu il y a dix jours et je ne me souviens déjà plus de grand chose...

 

Je me souviens cependant d'avoir constaté un phénomène étrange : Géraldine Nakache et Kim Rossi Stuart sont assez peu crédibles individuellement (l’accent de KRS le sauve en le rendant instantatément sexy, mais les gros plans sur Géraldine Nakache qui (sur)joue du violon n’étaient pas une bonne idée), mais par contre le duo fonctionne plutôt bien. En d'autres termes, on ne croit pas vraiment aux personnages mais on croit à leur couple, ce qui permet de se laisser attendrir, faute de se laisser emporter.

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- Sunbelt Express, de E. Buxbaum

- Hasta Mañana, de O. Vidal et S. Maggiani

- Stop the pounding heart, de R. Minervini

- Fever, R. Neal

- Kill Your Darlings, de J. Krokidas

- Des lendemains qui chantent, de N. Castro

- The Face of Love, de A. Posin

- Lions Love..., de A. Varda

Xenia

de Panos H. Koutras

avec Kostas Nikouli, Nikos Gelia

 

 

 

Comédie dramatique, 2h08 (Gr./Bel./Fr.).

Sortie le 18 juin 2014.

À la mort de leur mère, Dany et Odysseas partent à la recherche de leur père. Leur roadtrip doit aussi les conduire aux auditions de "Greek Star", où Odysseas va tenter sa chance en hommage à sa mère, chanteuse de cabaret.

Xenia

Présenté dans la sélection Un Certain Regard à Cannes, Xenia n’a pas volé cet honneur car c’est précisément ce qu’il offre : un certain regard. Un certain regard sur la Grèce, un certain regard sur la famille, mais surtout un certain regard sur la sortie de l’enfance. 

 

Tout en couleurs, inséparable de son lapin Dido et accro au sucre, Dany est un grand enfant de 16 ans qui voit le monde comme il a envie de le voir. Il forme avec son frère Odysseas, plus responsable mais tout aussi sensible, un duo tendre, qui trouve peu à peu un équilibre (après des années de séparation). Les deux acteurs sont extra, à la fois individuellement et par l’alchimie palpable qu’il y a entre eux. 

 

Adoptant le point de vue de Dany, le film possède une richesse symbolique qui requerrait sans doute plusieurs visionnages. Ne serait-ce que la BO à base de tubes italiens des années 70 (kitsch mais savoureux), qui contribue à signifier, bien sûr, l’attachement des deux frères à la mère dont ils font le deuil, mais qui a aussi ce double rôle de souligner l’exubérance de Dany et de donner à Odysseas, plus pudique, un moyen d’exprimer ses sentiments. Idole (et avatar) de leur mère, la chanteuse italienne Patty Pravo fait un caméo à la fin, pour donner corps à ce personnage invisible qui, à travers ses chansons, a été symboliquement présent tout le long.

 

Dans la musique comme dans l’image, la frontière entre réel et imaginaire est sans cesse remise en question : Dany semble souffrir d’hallucinations, le spectateur n’est donc jamais sûr de rien. Quel meilleur moyen que ce rapport incertain à la réalité pour traduire la perte des illusions et les doutes de l’adolescence ? Le fantasme (le fantasmé) fait de brusques apparitions, créant des parenthèses oniriques dans un film au demeurant très réaliste. La mort de Dido, le rêve sur le torse du père, les deux moments de danse (chez Tassos ou au Xenia)... : ces moments poétiques, suspendus, ont largement éclipsé - du moins pour moi - l’aspect social du film

 

Et pourtant cet aspect est bien présent : les deux frères sont albanais, et de surcroît Dany est gay. Sur fond de crise économique et de néo-fascisme (Aube dorée), cette double marginalité est d’autant plus difficile à vivre que Dany est encore presque un enfant : là où il a un besoin criant d’affection, la société le rejette violemment, physiquement. Dans une telle situation, vaut-il vraiment la peine de se battre pour la nationalité grecque ? 

 

Car évidemment, l’enjeu du film n’est pas que Dany et Odysseas obtiennent ce qu’ils veulent (un père, des papiers, de l’argent), car - spoiler - ils n’obtiennent rien, mais plutôt qu’ils parviennent à réaliser qu’ils n’ont pas besoin de tout cela. Pour Dany, il s’agit de régler ses comptes avec la figure paternelle, et peu importe que ce soit avec son vrai père ou non ; pour Odysseas, l’objectif est de passer l’audition de Greek Star pour rendre hommage à sa mère et faire le deuil. Alors seulement peuvent-ils embrasser tous deux leur héritage, accepter leurs origines et devenir adultes.

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